Takengon, fraîcheur et générosité

Publié le par marie di solo

 

     Et puisqu'il parait que les bonnes choses ont toujours une fin, nous quittons notre paradis afin de redescendre tranquillement vers le sud, il nous faut toujours rencontrer les enfants de la forêt qui vivent encore sans maison. Avant tout, un long trajet nous attend avec beaucoup de choses à voir.

 

      Nous avons vu sur la carte qu'au centre de Aceh, il y avait un lac, assez grand, assez en hauteur donc frais. Nous décidons de nous y rendre, ce qui nous permettra aussi de ne pas repasser par la côte. Nous reprenons donc notre trajet, pancartes à la main, atterrissons au milieu de nul part.

 

     Après quelque temps d'attente en plein soleil, sur une route sablée de désert et désertique, deux imposantes voitures noires se garent un peu plus loin. Des mecs assez baraques en sortent. Ils sourient, ils nous disent de monter, ils commencent à parler entre eux pour savoir dans quelle voiture on devrait monter, et puis ils nous montrent finalement la voiture de devant. Cette voiture est dotée d'une antenne parabolique sur le toit et d'un espèce de sabre en guise de proue. Un des jeunes gars gaffe en disant « ho ! Vous allez être avec Monsieur kap... » un « chut chut chut » d'un autre gars le fait taire. Nous comprenons qu'il y a quelqu'un d'important là-dedans mais on ne sait pas qui. Mafia ? Trafiquants ? Militaires ? Politique ? Nous montons.

 

     Le gars assit sur le siège passager commence d'un ton formel. Noms, prénoms, âges, occupations... Nous répondons à toutes ces questions en essayant de paraître le plus décontracté possible. Il parle un indonésien rapide, il est très difficile de le comprendre. Mais il souri. Nous lui demandons à son tour qui est-il. « Je suis, Edwin, chef de la police de Aceh, vous êtes en sécurité avec moi » et il rit. Il est simple, amical, jovial... Nous parlons de tout avec lui, de l'indépendance d'Aceh aux plantations de cannabis (servant à --parait-il-- financer l'armement des rebelles indépendantistes) en passant par sa famille, fille et femme vivant toutes les deux à Jakarta.

En route, nous nous arrêtons afin de goûter un café. De fait, le centre de la province d'Aceh est fournie. Les plus chers cafés du monde viendraient d'ici. Nous nous installons tous les trois à une table du bar alors que les 4 armoires à glace restent au comptoir, surveillant les moindres faits et gestes d'Edwin. Un simple mouvement du petit doigt et un des flics arrive sans même que nous ayons remarqué qu'il était appelé. Ils ont désapprit à dire « ya(oui) » mais le mot « siap(prêt) » ornemente toutes leurs fins de phrases. Même à la question de savoir s'il veut un café, il répondra « prêt ». Entre nous trois, l'ambiance est bon enfant, détendue. Nous reprenons la route sans avoir vu qui que ce soit payer pour ce que nous venons de consommer. 

 

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Sur un premier plan de champs de café, le lac de Takengon se dessine au loin,

dans la fraicheur de la montagne

 

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Derrière nous, Takengon. Dans l'ordre: Berit, Edwin, Marie, Un Chiffre Chauffeur..

 

     Arrivés à Takengon, Edwin nous demande où nous restons. Nous lui expliquons que, comme la plupart du temps, nous ne savons pas encore et que nous allons chercher un warung pour passer la nuit. Il nous regarde, souri et demande à ses hommes de nous loger. Ils nous déposent à un hôtel, très calme, on leur dit que nous ne pouvons nous offrir ce luxe. Il n'est pas question de cela, la note sera pour lui, ou plutôt, ne sera pas pour nous. Nous resterons autant de temps que cela nous plaira.

 

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Des rencontres volantes aux abords du lac

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     Devant tant de générosité, nous nous demandons qui paye tout cela, d'où vient cet argent. Corruption ? Amendes ? Taxes ?... Tout cela restera bien sur sans réponse.

     Dans l'après-midi, nous recevons un message d'Edwin disant qu'il vient nous chercher à 20h00 pour le dîner.

 

     Nous cherchons dans nos sacs de randonneuses/baroudeuses quelque chose de correct à porter, ce n'est pas une mince affaire !

     À 20.00 pétantes un flic frappe à la porte de la chambre. Nous le suivons.

     Nous arrivons dans un warung. A l'étage, une table pour 20 personnes est dressée avec des plats à n'en plus finir en son milieu. Nous nous installons. Berit et moi, Edwin et son chauffeur de l'après-midi, un jeune policier de 22 ans, tout fraichement diplômé disposé à tout ce qu'Edwin dit, 2 chinois et 2 ou 3 autres policiers. Nous mangeons comme 4, ils veulent que nous goûtions à tout. Vers la fin du repas, Edwin nous demande si nous aimons la bière. Dans cette région où la vente et la consommation d'alcool sont interdites, cette question nous fait sourire. Il nous répète qu'il est le chef et qu'il n'y a aucun problème si nous sommes avec lui. Il demande donc à l'un des chinois de rapporter des bières. Cet homme tient une petit échoppe et il se fait souvent ramener des bières de Medan (grande ville de Sumatra à la frontière d'Aceh). Il remonte avec de la bintang(bière blonde indonésienne). Edwin, toujours avec beaucoup d'humour, lui fait remarquer qu'il aurait pu prendre de la brune aussi, son pote rigole, s'excuse et redescend pour, quelque minutes plus tard, nous apporter de la guiness.

     Nous quittons le warung sans, encore une fois n'avoir vu qui que ce soit payer quoi que ce soit.

La terrasse d'un hôtel sur le lac fera l'affaire. Nous nous installons, Un de ces amis ramène des frites à manger. Ça parle beaucoup d'hospitalité, que c'est normal de faire cela pour nous, qu'ils espérent bien que, s'ils venaient en France, ils recevraient le même accueil. Cela va sans dire...

     C'est le dernier jour de la pleine lune. Demain, elle recommencera à décroître. Nous, nous descendrons vers le sud pour continuer notre périple.

 

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     Il est 23h, le chauffeur d'Edwin lui dit qu'il est 23h et qu'il faut rentrer. Edwin approuve, se lève et, tel un mécanisme bien huilé, se déplace vers la voiture afin de rentrer.

 

     Nous resterons 2 nuits à Takengon. Et, jusqu'au dernier jour où nous lui expliquons que nous voyageons en stop, il refusera de nous laisser partir comme cela et commandera un travel pour nous déplacer, appellera son ami chef de la police de Kutacane pour notre hébergement une fois arrivées et nous emmènera petit déjeuner en compagnie de 10 uniformes alors que nous lui disons que nous n'avons pas encore mangé.

 

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Aux hasards de la ville

     Une rencontre parmis tant d'autres, un sourire qui marque, des discussions très intéressantes au fil des jours, des nouveaux paysages découverts... Sumatra regorge de surprises, les pires comme les meilleures. Nous en ferons les frais par la suite mais, chaque chose en son temps, direction Kutacane, quelque 100kms/12h au sud.

 

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Berit et Edwin, une photo sur le départ, un dernier sourire, une visite de son bureau,

ses coupes et médailles, trophées et décorations... Une fierté qu'il a l'air heureux de partager avec nous

 

Enfin, quelques photos de la ville et du lac, à l'heure d'un coucher de soleil

 

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Cet homme revient du milieu des rizières, trainant derrière lui

ses deux buffles d'eau qu'il nettoiera avec grand soin

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Un coucher de soleil sur le lac... couleurs, calme, silence, silence, silence...

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